Session spéciale 03: Les territoires de la vigne et du vin dans la mondialisation : approches spatiales, paysagères et par les acteurs

Coordonnée par François Legouy (Université Paris 8, e-mail: francois.legouy@univ-paris8.fr)

Appel à communications

Les territoires de la vigne et du vin sont des objets géographiques à haute valeur ajoutée, où les aspects économiques, sociaux, environnementaux et patrimoniaux ont une place de première importance. Le vin est sans doute l’une des productions où le retour sur investissement est l’un des plus efficaces, pour peu que l’on dispose de vignes et de vins à forte renommée. Le vin est aussi un marqueur des civilisations méditerranéennes qui ont diffusé la production et la consommation jusqu’aux limites de la planète, et ce, y compris dans les régions tropicales à des « altitudes tempérées ». Si l’Europe en général et la France en particulier demeurent les centres géographiques de la production, de la consommation et des échanges, la concurrence internationale des pays du Nouveau Monde et de pays émergents (Chine, Inde, Brésil) est forte.

Dans ce cadre mondialisé, le concept de territoire revient en force avec le souci du terroir en lien avec des appellations d’origine, de la production locale et labellisée, où la reconnaissance porte sur les appellations contrôlées ou protégées par les Etats. Parallèlement, les démarches environnementales de production raisonnée, bio, en biodynamie, de vins nature en dehors de toute réglementation des vins d’appellation comptent de plus en plus de partisans qui rejettent les vins industriels et veulent produire des vins originaux et authentiques. La question de la pollution des sols et des nappes d’eau par les intrants (engrais, produits phytosanitaires), de la pollution de l’air, les maladies de la vigne (esca, phylloxéra, oïdium, mildiou, …), la maîtrise de l’eau et son approvisionnement dans les pays souffrant d’une sécheresse estivale accentuée, sont autant de données qui mettent en jeu la durabilité économique, sociale et environnementale de la viticulture. Il est de plus en plus question de parler de transition pour un système vitivinicole en pleine recomposition.

La production du vin bénéficie partout à la fois d’innovations technologiques importantes, de l’internationalisation de cépages qualitatifs à forte notoriété, comme de l’intérêt nouveau pour les cépages anciens et également d’une reconnaissance grandissante de vignobles reconnus et promus au label du patrimoine mondial de l’humanité pour leurs paysages culturels exceptionnels et universels. Il est vrai que les paysages viticoles font partie des paysages agricoles les plus appréciés qu’ils soient à échelle humaine en Europe ou immenses dans les pays du Nouveau Monde. Cette reconnaissance du patrimoine de la vigne et du vin s’accompagne de mises en scènes paysagères qui rappellent aux œnotouristes les caractères identitaires de ces territoires. L’œnotourisme est de plus en plus intégré dans son organisation dans un tourisme global et se présente comme une alternative crédible et complémentaire pour les petites structures viticoles à la recherche d’un second souffle économique. Mais pas seulement : il est pris en main par les acteurs des plus grands vignobles mondiaux qui créent une mise en désir œnotouristique des territoires et veulent attirer une clientèle en recherche de nouveauté par des musées de la vigne et du vin, par des mises en scènes, et des activités originales en proposant des offres expérientielles où les touristes de spectateurs deviennent les acteurs de leurs séjours… Dans cette activité, la gastronomie renforce l’attractivité des territoires en suggérant des alliances entre produits de terroirs, mets régionaux et vins locaux.

Le contraste entre une large diffusion de cette véritable civilisation de la vigne et du vin et un besoin de reconnaissance locale et internationale est saisissant. Il souligne la réussite économique d’un modèle de production agricole avec des investissements de la part des principaux acteurs internationaux, souvent des firmes transnationales et l’attraction du vin, qui est recherché par les élites mondiales car il apparaît porteur de réussite sociale et de nouveauté. Il montre aussi que ce modèle viticole est fragile, car son économie subit les inévitables et irréguliers soubresauts de la loi du marché, les aléas météorologiques interannuels, sans oublier la crise sanitaire actuelle qui sévit et frappe durement les petites structures de production. L’évolution économique met en relief un effet de concentration des structures de production, avec une réduction du nombre des petites exploitations viticoles, avec des alliances de plus en plus fréquentes entre caves coopératives et entre caves coopérative et négociants. Cette session spéciale portera sur les caractéristiques de la mondialisation du vin, sur la diversité des contrastes territoriaux et paysagers de la viticulture dans le monde, sur la reconnaissance du patrimoine vitivinicole, sur la recherche de nouveaux styles de vins authentiques, sur les enjeux environnementaux de la viticulture, sur le rôle des acteurs, individuels, sociétés, Etat, enfin sur le rôle de l’œnotourisme qui tout en s’intégrant dans un tourisme culturel global s’en démarque par son originalité.

Références bibliographiques

BOULANGER Sylvaine, 2019, « L’AOC ne ferait-elle plus rêver ? » in POULOT Monique, LEGOUY François et BERCHE Grégoire, 2019 (dir.), « Vins, vignes et vignerons : quelles transitions ? », Paris, POUR, p. 283-296.

BROCHOT Aline et ALBERT Krisztina, 2019, « De transition en mutation, le vignoble de Tokaj aujourd’hui », in POULOT Monique, LEGOUY François et BERCHE Grégoire, 2019 (dir.), « Vins, vignes et vignerons : quelles transitions ? », Paris, POUR, p. 103-116.

LEGOUY François et BOULANGER Sylvaine, 2015, Atlas de la vigne et du vin – un nouveau défi de la mondialisation, Paris, Armand Colin, 176 p.

LEGOUY François, 2019, « Le commerce international du vin et ses logiques territoriales à plusieurs échelles », Géocarrefour, 93/2, https://journals.openedition.org/geocarrefour/13442

LIGNON-DARMAILLAC Sophie, 2019, « Les routes des vins vers l’œno-gastronomie », Territoires du vin, n° 10, https://preo.u-bourgogne.fr/territoiresduvin/index.php?id=1753

POULOT Monique, LEGOUY François et BERCHE Grégoire, 2019 (dir.), « Vins, vignes et vignerons : quelles transitions ? », Paris, POUR, 430 p.

REJALOT Michel, 2019, « Dynamiques et évolutions récentes des acteurs et métiers dans le vignoble de Bordeaux », in POULOT Monique, LEGOUY François et BERCHE Grégoire, 2019 (dir.), « Vins, vignes et vignerons : quelles transitions ? », Paris, POUR, p. 81-89.

SCHIRMER Raphaël, 2018, Vignes et vins, paysages et civilisations millénaires, Grenoble, Glénat, 256 p. SCHIRMER Raphaël (dir.), 2020, Bordeaux et ses vignobles. Un modèle de civilisation. Bordeaux, éditions du Sud-Ouest, 320 p.

Comments are closed.